Histoire
Les portes de la prison se referment derrière moi. J'ai peur mais je ne le montre pas. Je sens qu'on viendra vite me chercher et qu'on payera la caution. Les bruits de mes talons font écho dans toute l'allée et ma minijupe attire les regards curieux des prisonniers. Cet endroit sent mauvais et ma présence dérange. Je n'ai pas le physique de la serial killeuse ou de la trafiquante de drogue mais bien celui de la prostituée. On me fait rentrer dans une cellule d’interrogatoire. J'ai de la chance d'être interviewée par une femme, qui après m'avoir fouillée de fond en comble me fait asseoir en face d'elle.
Comment tu t'appelles ? Betty. Nom de famille ? Seinfield. Elle note tout. Je la vois trafiquer ses dossiers. J'aime pas trop ça. Les accusations que l'on me donne sont fausses mais mon avocat commis d'office n'est pas encore arrivé pour me défendre.
Tu fais quoi dans la vie Cassie ? Serveuse au Irish Pub.
Tu te fous de moi ?! J'apprends que la policière en sait pas mal à mon sujet. Cette situation m'inconforte. Ne sachant quoi répondre, je dis simplement.
Bon c'est vrai que je ne suis pas souvent au boulot.La caméra me fixe, moi la petite fille d'Overton. La fille de bonne famille ayant tout quitté pour s'installer à Washington ville du pouvoir et du vice. Le pouvoir je le côtoie le vice aussi.
Depuis combien de temps tu te prostitues ? Deux ans. Ne t'inquiète pas ma jolie, si tu nous dis ce qu'on veut entendre, on peut te faire sortir de l'engrenage. C'est pas à vous de savoir ce que je veux ! Tout est enregistré, je sais mais je me fiche de savoir que l'enregistrement va être gardé puisque je sais qu'on va venir me chercher.
D'où viens tu Betty ? D'Overton, en Alabama. Mes parents sont James et Hilary Steinfield, des bijoutiers très accros à la religion on va dire. Je suis partie tôt de chez moi parce que cette ambiance de Jésus Christ vivant au-dessus de moi m'étouffait. Pourquoi la prostitution alors ? Une fille de parents aussi dévots devrait suivre un droit chemin, non ? Le droit chemin ? J'avais envie de quelque chose de plus fun, de plus cool. Je travaillais comme strip-teaseuse au début mais un homme m'a convaincu que je pourrais en faire plus. Je sentais son regard sur moi, ce regard de femme mal mariée voir même mal baisée qui m’insupporte. Si elle compte m'arrêter pour ça, je pense que je vais faire 120 ans de prison vu tous mes rendez-vous monnayés. J'ai envie de me casser mais je ne le fais pas pour ne pas envenimer ma situation. La nana continue :
Qui as tu comme clients d'habitude ? Des hommes, des femmes.
Les femmes ne me gênent pas, elles sont souvent plus tendre et plus attentive à la personne que je suis. Je voulais dire en métier, en classe social ? Vous voulez me demander si je couche avec des politiciens ? J'osais pas le dire comme ça mais oui. Ben oui, et alors ? Son visage se glace et en même temps s'intensifie au son de mon oui. Elle tient ce qu'elle recherche mais je sais aussi gardé mes petits secrets.
Qui ? Je ne vais pas donner de liste ! Elle sort de la pièce. Je pense à un moment de répit mais elle revient bien vite avec des photos en main. Des photos en A4 avec un zoom énorme. Je les zieute de loin et aperçoit une personne sur laquelle je sais qu'elle va me poser des questions. Je prends une respiration intense avant de me lancer dans la suite de l'interview.
Tu as été vu en sa compagnie plusieurs fois. Tu sais qui il est ? Oui c'est un sénateur. Son nom ? Eliott Greenbell. C'est un client ? Oui. Combien de fois ? Je ne sais pas. Nous on doit savoir. Je sais pas 14-15 fois. ça fait longtemps qu'il me fréquente. Je n'aime pas la tournure que prend cet interrogatoire. Normalement c'est moi l'accusée. On pense que j'ai volé des robes de luxe chez Madame Lucy Trusdall, une riche avocate. Mais il n'est rien ! Enfin si mais c'est pas dans mon intérêt ...
Je sais quoi dire, quoi faire pour ne pas être prise pour une voleuse mais le naturel revient au galop. Pourquoi une fille comme moi avait volé ? Tout simplement parce que cette femme m'avait humilié alors je voulais lui rendre l'appareil. Elle m'avait fait sortir de force de chez elle, m'ayant découverte avec sont fils de 27 ans dans son lit. L'Américaine pure et dure, qui préfère cacher toute référence sexuelle et montrer le meilleur d'elle-même. Elle m'a jetée dehors en me traitant de "pute" (ce que je suis alors là je peux rien dire) mais aussi de "salope", tout en me frappant au visage. J'ai eu un bleu pendant une semaine, m'empêchant de travailler. Alors je lui ai rendu visite et elle n'était pas là. Du coup je me suis servie. Je sais que je suis fautive mais j'avais mes raisons. D'accord c'est contraire à la loi, d'accord j'aurais dû réfléchir. J'ai agit sur l'instant. Si c'était à refaire, je ne le referais pas. Qui me croira ? Un rebondissement vient me troubler. J'ai l'impression de tressaillir mais je me retiens. Un homme entre brusquement dans la pièce :
On a payé la caution. Ces mots sonnent comme une bénédiction. Je commence à me lever et à prendre mes affaires, sans lancer le moindre regard à mon intervieweuse.
Tu as de la chance Betty. Profite-en bien. On me détache et je sors de la pièce avec la légèreté que m'apporte cette nouvelle.Dehors, un homme m'attend devant sa voiture. C'est Eliott. Je savais qu'il viendrait me chercher ! Il ferait n'importe quoi pour moi. C'est quelque chose qui me gène. Je me sens pas bien dans la peau de sa favorite mais le sachant célibataire (officiellement) cela m'importe moi que s'il était marié. Pourtant je n'arrive pas à le freiner dans sa cour. Je n'ai pas envie d'entacher sa carrière de sénateur, surtout que je crois qu'il vise plus haut. Une femme comme moi, une prostituée quoi, ça doit pas être bon en campagne. Il ne se rend pas compte de ce qu'il fait en sortant avec moi.
Eh bien pourquoi tu t'es foutue dans un bordel pareil ? C'est la dernière fois, je te promets. J
e suis sûr que tu avais une bonne raison te connaissant. Il m'enlace et m'embrasse devant les gardiens. Je préfère aller plus loin pour parler.
Tu as payé la caution ? Tu crois quand même pas que j'allais te laisser tomber ? Non c'est vrai. Emmène moi loin. J'ai plus envie de revoir leurs têtes ! Il ouvre la porte de devant côté passager pour me laisser entrer. Avant d'entrer lui aussi, il fait un signe au gardien posté dehors. Pas un mot de tout ça. Je crois que la caution est plus importante que je ne le croyais.
Cela aurait pu rester comme ça jusqu'à la fin mais si je suis là, ce n'est pas pour rien non ? Vous savez pourquoi je suis enfermée ici pour les quatre années à venir ? Prostitution, racolage sur la voie publique, exhibitionnisme (ben on fait son job où on peut), possession de drogue (pas pour moi) et trafic de drogue. A force d'accumuler, ça explose ! Surtout que je n'ai plus la protection de mon ami politicien depuis que j'ai refusé sa demande en mariage. Je suis une pute, le mariage ce n'est pas pour moi. Après avoir lu l'acte d'accusation, j'ai cru tomber de haut mais mon avocat commis d'office m'a rassuré que je n'aurais pas la peine capitale si je fais un petit tour par la case prison. Au début ça m'a bien refroidit mais lorsque j'ai entendu
Mademoiselle Betty Johanna Steinfield vous avez été déclarée coupable pour tous les chefs d'accusation à votre encontre. Votre peine s'élèvera à 4 ans de prison dont 2 fermes., je n'osais plus rien dire. Moi d'habitude grande gueule on avait réussi à me la couper.