"C'est marrant je continue de finir tous les pims avant d'arriver à la caisse. ça insupportait ma mère au plus haut point quand on faisait les courses ensemble parce qu'elle voulait toujours payer tout ce qu'elle devait. Moi ça me passait au dessus.
_ Alors t'étais du genre bouboule à l'école primaire...
_ Ouais un peu. Mon psy m'a dit que je compensais pour arrêter de penser à mon oncle qui m'avait violé.
_ Quoi?... June je suis désolé. Je...
La rouquine échangea un regard avec son interlocuteur le dévisageant soigneusement avant de pouffer de rire et de partir plus loin au rayon des biscuits apéritifs.
_ TU... Tu n'as jamais eu de psy c'est ça? Elle se fout de moi... Putain June, t'es vraiment pas nette comme fille! Tu le sais ça?"

Alors qu'un agent lui demande de s'accroupir et d'écarter bien les fesses, June se demande s'il serait de mauvais goût de glisser une petite blague pour détendre l'atmosphère. Un jeu de mot avec cul serait un peu cru d'autant plus que la gardienne de prison n'avait pas l'air de rigoler facilement. June se releva rapidement pour ne pas attraper froid et agrippa son uniforme d'une couleur qui lui piquait les yeux. "Excusez moi... Je pourrais avoir un autre coloris? Non parce que orange sur orange ça ne me va pas du tout." June désigna sa chevelure du doigt et la gardienne afficha un rictus éberlué. Ah j'ai réussi à la faire sourire finalement.
"Mais bien sûr, on a toute une collection printemps-automne prison c'est à l'intérieur que ça se passe."
June répondit à son sourire avant d'enfiler sa combinaison qu'elle espérait conforme aux normes d'hygiène contrairement à tout ce qui l'entourait. Elle ne se savait pas si chochotte concernant la propreté et cela lui fit un choc de ressentir autant de frissons parcourir sa nuque à la vue des murs craquelés de moisissures foncées et suintantes et autres moutons de poussière gros comme un poing flottant tels des fétus de paille sur le lino. June prit une grande inspiration. Ok. Calme toi ma grande. Et souris.

C'était le grand défilé des nouvelles venues que June menait juste derrière l'agent qui leur montrait les lieux. La rouquine n'hésitait pas à faire petits signes de la main aux prisonnières déjà en place qui lui adressaient des grognements. Elle comparait cette expérience à une visite au zoo.. De longue durée. June a toujours adoré le zoo.

"Tu as toujours adoré le zoo!

New Haven 2 ans plus tot.

June, la vingtaine passée et fraichement diplômée de ses études en commerce et communication relève la tête avant de sauter hors du canapé pour se sortir de cette situation et faire mine de chercher quelque chose dans son sac.
_ C'est adorable de t'en souvenir maman. J'ai du te dire ça à l'âge de 6 ans et demi mais c'est déjà pas mal. Peut être que ce soir tu me feras mon plat préféré lorsque j'avais quatorze ans. *June porta ses mains à son visage d'un air faussement excité* Des hot dogs avec supplément moutarde!
Madame Simon fit un geste théâtral en l'air pour bien signifier que sa fille était impossible.
_ J'ai promis à ton oncle et à tes petits cousins que tu leur ferais visiter la ville. Ils ne sont là que pour le week end et tu sais très bien que ton père et moi travaillons.
_ Désolée maman, une autre fois!
_ Tu dis toujours ça pour ton oncle! Tu sais qu'il a le même sang écossais que nous? Ta grand mère serait vraiment déçue de ton comportement. Trouver du temps pour sa famille c'est primordial.
_ J'ai des entretiens d'embauche figure toi.
_ C'est vrai?"
La question de sa mère se perdit après que la porte d'entrée fut claquée. June vérifia son maquillage dans son miroir de poche en forme de panda avant de sourire à son reflet. C'était une belle journée pour trouver un emploi.

"Et vous dîtes que vous avez un rendez vous? Mademoiselle...
_ Smith... Ou bien est ce Jones? Marmonna June entre ses dents en se dévissant la tête pour voir les noms qui se trouvaient inscrits sur la liste de la dame de l'accueil. Cette dernière comprit rapidement son petit jeu et ferma son agenda.
_ Si vous n'avez pas de rendez vous, vous devez en prendre un avec la réceptionniste.
June poussa un soupir de rage.
_ Vous croyez que je n'ai pas déjà essayé depuis un mois? Je tombe tout le temps sur votre musique d'attente. *Elle commença à fredonner l'air très fort et les quelques personnes dans les couloirs s'arrêtèrent pour la fixer* Elle est très... Très pénible soit dit en passant. Voilà mon conseil vous feriez mieux d'investir dans une nouvelle musique d'attente... Et! Dans une nouvelle employée qui vient juste d'être diplômée! Yeah..." June chercha un appui auprès des gens autour en vain.
"Notre agence est la première du Connecticut, nos lignes sont souvent saturées. La réceptionniste c'est la deuxième à droite en sortant."
June traina des pieds avant de s'engouffrer en traitre dans les bureaux.

"Le premier boulot. Le mariage, les enfants. J'ai vite su que ce n'était pas pour moi. Tu vois ce que je veux dire Tania?
Sa colloc temporaire de cellule la fixait sans rien dire depuis une demie heure d'un air mauvais. June soupçonnait qu'elle ne parle pas la langue. Elle l'avait baptisé Tania car c'était un prénom de boxeuse allemande selon elle et cela lui allait bien. June se ré adossa au mur de sa cellule et porta son regard au plafond.
_ Je veux dire que même si j'ai réussi à décrocher le boulot, on s'ennuie vite. Et puis les collègues ne suivent absolument pas les directives. *Elle marqua une pause profondément dans ses pensées* Comment je pouvais savoir que Don était le mari de la boss aussi?... Tout ça pour dire qu'au bout de deux semaines je me suis barrée avec le listing clientèle et j'ai monté ma propre boite. Le juge a appelé ça de l'arnaque de masse par internet et de la concurrence déloyale mais on voit bien qu'il n'a pas mis les pieds dans les bureaux depuis longtemps celui là. La compétition est partout. Tu sais quoi Tania? Tant qu'il y aura des petits vieux qui ne savent pas quoi faire de leur pension retraite je serais là." Sur ce elle hocha la tête gravement avant de se taire devant l'arrivée de leur troisième colloc de fortune, une fluette et jolie blonde qui avait l'air de s'être perdue dans la prison.
"De quoi vous parlez?
_ Je racontais à Tania comment j'ai attérri en prison. Tu veux connaitre mon histoire?
Elle haussa les épaules:
_ Ouais pourquoi pas.
June descendit de son lit superposé et se rapprocha dangereusement de la nouvelle.
_ Agression à l'arme blanche... *Elle mima le coup ce qui fit sursauter la fille.* 33 coups de couteau! Parce qu'elle avait une voix nasillarde comme toi et qu'elle voulait pas la fermer."
Tandis que les yeux de la blondinette sortaient de leur orbite sous l'effet de la peur, Tania se décida enfin à bouger pour sauter sur June et tenter de l'étrangler. L'escroc à terre se débattait comme elle pouvait en criant à l'aide. June a beau la ramener, elle n'a jamais été très physique.