La prison est un lieu qui propose peu de divertissement, alors nous prisonnier faisons preuve d'imagination pour tuer le temps lorsque nous ne travaillons pas. Qu'ils me manquent ses soirs ou lorsque je m'ennuyais, j'enfilais une simple veste pour rejoindre une salle de cinéma et me divertir pendant quelques heures. Cela m'est devenu impossible depuis ma condamnation l'année dernière, voilà un an passer maintenant que j'étais ici, entre ses quatre grilles. Par chance, la population des lieux était assez variée, il était facile de passer de la camée en manque au tueur accidentel. Les conversations étaient toute plus différentes les unes que les autres, ce qui enrichissait intellectuellement certain pensionnaire comme en abrutissait d'autre. Aujourd'hui c'était avec une feuille de papier et un crayon à mine grasse que j'entrais dans la salle de repos, trouvant une table vide dans un coin, je saluais quelque détenus en passant à leur côté, m'arrêtait un instant pour taper la discute à un tolard plutôt agréable à l'œil, puis j'allais m'installer dans mon coin avec ma feuille.

Je commençais rapidement à gratter la feuille de ma mine pour y laisser apparaitre des traits délicat et précis, laissant doucement apparaitre les lignes d'un bas du dos féminin, les ombrages terminés, je m'appliquais à y faire apparaitre un nouveau dessin parmi les lignes du corps. Doucement, délicatement, avec un peu de temps commençait à apparaitre une chouette effraie aux traits fins et aux détails intéressants. Un œil plus gros que l'autre, un bec surdimensionné, une plume atrophiée et une pâte en moins. Le tout reposant sur une branche grignotée par le temps et sur le point de céder. Le tout terminé, cela avait des allures de scène Burtonienne, comme ci le cinéaste c'était infiltré dans mon corps pour y transmettre son univers. En tout cas, c'est cela que m'inspirait ce nouveau dessin, qui à mon avis, s'implanterait parfaitement sur ma peau lorsque je sortirais de cet endroit dans bien des années encore, quatorze pour être précise.

Concentré sur l'interprétation des dernières ombres à réaliser pour rendre le tout plus réaliste, je relève soudain la tête lorsque j'entends le sifflement d'un tolard qui me reluque ouvertement. Encore un de ses mecs qui se crois irrésistible et qui pense pouvoir m'attirer dans un placard à balais après avoir soudoyé un gardien. Je lui offre un sourire charmeur et un beau doigt d'honneur avant de me détourner de lui, mon regard se pose alors sur une crinière rousse que je ne connais pas. Sa tenue orange ne laissait aucun doute sur le fait qu'elle était nouvelle dans le coin. Son expression ne laissa pas la place au doute, elle cherchait ou elle pourrait s'installer pour passer un petit temps sympathique avec d'autres détenus. Son regard passait entre les parties de cartes, de dominos ou de bras de fer. Maintenant, ce fut moi qui sifflai :

- Hé, la nouvelle ! Viens faire un tour par là !

Elle regarda autour d'elle comme pour voir si c'était bien à elle que je parlais :

- T'en voie d'autres des oranges dans la pièce ? Aller viens, jvais pas t'bouffer.

Who are you?

Pendant un bref instant de flou, June vit sa chambre avec une vue du tonnerre sur le parc de New Haven, un peu en bordel mais assez clean pour zigzaguer entre les petites culottes et les fringues nouvellement achetées auxquelles elle n'avait pas encore enlevé leurs étiquettes pour pouvoir se faire rembourser après qu'elle les ait bien porté.
Une secousse parcourut le sommier métallique de son lit superposé.
"Hey salope! Rends moi ma couverture supplémentaire!
_ Détenue! Il est interdit de courir!"
Elle cligna des yeux. Une jolie toile d'araignée parfaitement dessinée se tenait juste là. Le mirage était parti. June fronça les sourcils et se recroquevilla un instant pour sentir tout son corps se contracter le long de sa colonne vertébrale. L'idée de rester allongée là toute la journée germa dans son esprit pendant un bref instant et puis elle se motiva. Elle n'était pas du genre à rester toute la journée dans son lit habituellement et ça n'allait pas changer juste parce qu'on l'avait collé dans ce trou! June se força à sourire et se redressa pour s'étirer de tout son long comme un chat. "Qu'est ce qu'on fait pour s'amuser ici?
_ Je peux te montrer si tu veux." Lança une voix mielleuse dans la pièce. June sursauta et se rendit compte qu'une détenue qui n'était pas du tout nouvelle se tenait dans l'entrebâillement de la porte. Elle lécha sa lèvre inférieure et la rouquine détourna les yeux en frissonnant.

En voyant la queue qu'il y avait pour les douches, June renonça à attendre pour le moment. Elle avait vu qu'il existait une cour où certains s'entrainaient à courir de longues distances. C'était peut être le moment pour elle de devenir sportive. On écrirait des articles sur elle, la prisonnière qui était devenue athlète grâce à la prison. Jun esquissa un sourire avant de se nouer les cheveux. Elle enfila une veste qui trainait sur un banc sans se préoccuper de son propriétaire et se lança à petites foulées sur le gazon. C'est bien. Petits pas après petits pas. Continue comme ça et tu auras les fesses bien musclées!

Dix minutes plus tard June s'allongeait de tout son long par terre. Les joues rouges et à bout de souffle, elle maudit l'inventeur du jogging et tous ses adeptes qui vous faisaient chier à la machine à café avec leur nouveau gadget bracelet qui comptait leurs pas tous les jours qui vous faisaient croire que se mettre au sport c'était super fun. June tendit la main en l'air vers un jeune homme qui passait par là. "J'ai... Les poumons... En feu..." Le prisonnier lui lança un regard de pitié avant de passer son chemin.

Une prisonnière trouva très drôle de voler la serviette de June alors qu'elle faisait la queue pour la douche. La rouquine se retrouva en tenue d'Eve à pourchasser une autre détenue pour récupérer sa serviette sous les sifflements des autres. Elle finit par abandonner et marcher fièrement dans les couloirs, toujours toute nue, pour retrouver le chemin des douches et se glisser dans une.

Des éclats de voix s'échappaient d'une salle entrouverte. June, les cheveux encore mouillés, s'engouffra dans la salle pour découvrir un espace de jeux qu'elle trouva tout de suite à son goût. Déjà il était mixte et puis il régnait une atmosphère bon enfant plein de cartes et de discussions animées. Qu'est ce qu'elle avait cherché à prouver ce matin sur la piste de course? C'était son endroit ici!

"Hé la nouvelle! Viens faire un tour par là!

Hein?

_ T'en voies d'autres des oranges dans la pièce? Allez viens j'vais pas t'bouffer."

June haussa les épaules avant de se diriger d'un pas nonchalant vers la chaise en face de la blonde. Elle posa ses coudes sur la table et lui sourit. "Je suis démasquée." June jeta un coup d'oeil à son croquis. "Cool le dessin! C'est de toi? T'es une artiste? ça tombe bien moi aussi!"
Automne paraissait légèrement sceptique mais ouverte à la discussion. June voulait peut être l'impressionner en racontant n'importe quoi ou bien juste se divertir et oublier son début de journée très passable. Elle avait toujours aimé raconter des conneries. Savoir que l'autre vous croyait comme cela alors que l'on était tout autre. Maitriser l'image que l'on donnait, prendre les autres pour des imbéciles, c'était très amusant. Parfois, June parlait tellement bien qu'elle finissait par croire à son propre mensonge. Elle se laissait emporter et devenait quelqu'un d'autre. ça ne blessait personne. Elle lui raconta qu'elle peignait des fresques murales et que son matériel lui manquait beaucoup. La jolie rousse se perdit tellement dans les détails qu'on pouvait se laisser prendre. June se dit à ce moment là qu'elle aurait pu être peintre si elle l'avait voulu."Mais bon, je ne fais ça que par passion. Je suis loin d'avoir atteint un niveau professionnel même si j'ai un petit blog où j'ai pas mal de reviews sur mes photos d'oeuvre. *June se prit ses cheveux dans ses mains et fit l'idiote en prenant la pause devant Automne.* Entre nous je suis meilleure muse qu'artiste. *Elle pouffa de rire avant de se demander.* Est ce que t'étais tatoueuse dans une autre vie? *Elle lui prit doucement la main et examina ses tatouages de plus près avant de hocher la tête comme pour approuver. Elle ne lui lâcha pas la main et lui sourit.* T'es super jolie! Tu veux pas qu'on soit amies?"

June ne se rendait pas toujours compte de quand ses paroles sonnaient curieusement mais en l'occurence, là si. Merde ça fait un peu lesbien. Elle sourit et précisa en relevant la tête: "Je suis bizarre. Mais, je fais de très belles manucures si t'as du vernis sur toi."